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Le Comité International Olympique peut-il interdire la réservation de noms de domaine similaire aux mots « olympic » et « olympique » ?


Les signes olympiques bénéficient d’une protection à part dans le droit de la propriété intellectuelle en vertu de l’article 6ter de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle du 20 mars 1883 (modifiée pour la dernière fois le 28 septembre 1979) (ompi.int). Cet article prévoit que les États membres de l’Union pour la protection de la propriété industrielle (179 à ce jour : ompi.int) doivent refuser ou invalider l’enregistrement et interdire l’utilisation des sigles ou dénominations des organisations internationales intergouvernementales comme marque de fabrique ou de commerce ou comme élément de ces marques. Le Comité International Olympique (CIO) bénéficie de cette protection. Le procédé est simple puisqu’il suffit au CIO de communiquer aux États son intention de protéger tel ou tel signe olympique.

À l’ère d’Internet, s’est imposée la nécessité de bénéficier d’une protection similaire contre l’enregistrement et l’utilisation abusive de noms de domaine. Ainsi, depuis l’adoption de la Politique de protection des identifiants des OIG et des OING dans tous les gTLD (icann.org), il est juridiquement interdit et a priori techniquement impossible d’enregistrer les expressions suivantes dans les extensions génériques :

  • olympic
  • olympiad
  • olympique
  • olympiade
  • olympisch
  • olímpico
  • olimpíada
  • أوليمبي
  • أوليمبياد
  • 奥林匹克
  • 奥林匹亚
  • 奧林匹克
  • 奧林匹亞
  • ολυμπιακοί
  • ολυμπιάδα
  • 올림픽
  • 올림피아드
  • олимпийский
  • олимпиада

(icann.org).

L’impossibilité d’enregistrer ces vocables réalise, en quelque sorte, une transposition des dispositions de la Convention de Paris dans le cadre juridique de l’ICANN. Une question a émergé : les bureaux d’enregistrement doivent-ils également empêcher l’enregistrement de noms de domaine similaires aux expressions contenues dans la liste officielle ci-dessus ? La décision D2022-3210 y apporte une réponse (WIPO, D2022-3210, The International Olympic Committee v. Registration Private, Domains By Proxy, LLC / Ryan Crowther, <olympicmetaverse.com>, transfer, panelist Andrew Brown KC). Les articles 3.6, 4.1 et 4.2 de la Politique de protection des identifiants des OIG et des OING font référence à l’expression « correspondance exacte », ce qui constitue un indice relativement solide. Malgré tout, aucune disposition de cette politique ne répond expressément à la question de la portée de la protection. Pour éclairer les parties, le tiers-décideur a fondé sa décision sur le rapport final de l’ICANN relatif à la protection des identifiants des organisations intergouvernementales dans tous les gTLDs (Final Report on the Protection of IGO and INGO Identifiers in All gTLDs Policy Development Process : icann.org). Or il se déduit de ce dernier que seuls les noms de domaine identiques aux vocables retenus dans la liste sont effectivement réservés. A contrario, les bureaux d’enregistrement n’ont pas l’obligation de bloquer les noms de domaine similaires.

Le caractère limité de la protection s’explique par des motifs tenant au respect des droits et libertés fondamentaux. En effet, élargir la portée de la protection reviendrait à interdire toute réservation de noms de domaine similaires. En pratique, personne n’est dupe : la vaste majorité des noms de domaine similaires au mot « olympique », qui n’appartiennent pas au Comité International Olympique ou à une personne autorisée, sont enregistrés de manière abusive. Toutefois, en théorie, certains noms de domaine similaires au mot « olympique » pourraient être enregistrés et utilisés à des fins légitimes relevant de la liberté d’expression et, bien que les cas soient infimes, le respect de cette liberté fondamentale explique l’impérieuse nécessité de restreindre la portée de la protection à la seule correspondance exacte des vocables retenus dans la liste des noms réservés.

Sur le plan de la stratégie de protection de la marque olympique, il convient également de souligner l’importance et la promptitude de la réaction du Comité International Olympique qui, assurément, ne peut se laisser développer des compétitions olympiques dans une univers parallèle car tel était bien, semble-t-il, l’objectif recherché par l’auteur du nom de domaine litigieux, <olympicmetaverse.com>.